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Vers un meilleur usage des antibiotiques : ceux qu’il faut, quand il faut

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Les antibiotiques sont des médicaments qui agissent en détruisant les bactéries ou en limitant leur prolifération. Ils ne sont destinés qu’aux seuls traitements des infections bactériennes et ne sont pas efficaces contre les infections virales.

Microorganismes présents partout dans notre environnement, y compris sur la peau et dans notre organisme, les bactéries se répartissent en de nombreuses espèces aux caractéristiques différentes. La plupart sont inoffensives et certaines sont utiles, comme celles qui constituent la flore intestinale et qui contribuent à un équilibre favorable à la digestion. D’autres sont à l’origine d’infections plus ou moins graves. Elles sont dites « pathogènes » lorsqu’elles sont systématiquement associées à une infection spécifique. C’est le cas par exemple de Vibrio cholerae, responsable du choléra. Certaines, comme le méningocoque, sont dites « opportunistes » quand, habituellement non agressives, elles provoquent une infection à la faveur d’un affaiblissement de l’organisme.

Face aux maladies d’origine bactérienne, potentiellement mortelles, les antibiotiques ont constitué une avancée majeure de la médecine depuis le milieu du XXe siècle. Leur efficacité a conduit à une surconsommation de ces médicaments tant en santé humaine qu’en santé animale.

En France en 2018, 728 tonnes d’antibiotiques destinés à la santé humaine ont été vendus : 93 % ont été dispensés en ville et 7 % en établissements de santé. Les antibiotiques les plus consommés en France sont : l’amoxicilline et l’association amoxicilline-acide clavulanique. En santé animale, ce sont 471 tonnes qui ont été vendus en France, et les plus utilisés sont les tétracyclines.

En 2016, la consommation d’antibiotique était 40 % supérieure à celle de la moyenne de nos voisins européens.

Cette surconsommation accroit le risque de développer des résistances bactériennes et entraine la nécessité de recourir à des antibiotiques de deuxième intention qui ne sont, le plus souvent, disponibles qu’en perfusion intraveineuse et de surcroit moins bien tolérés.

 

La résistance acquise

Si certaines bactéries sont par nature résistantes à un ou plusieurs antibiotiques, d’autres ne le sont pas naturellement mais sont capables de développer des facteurs de résistance lorsqu’elles sont exposées à un antibiotique. On parle de résistance acquise. Cette résistance résulte de la mutation de gènes, ou de l’échange de ces gènes mutés entre bactéries. Elles peuvent aller jusqu’à acquérir des facteurs de résistance à plusieurs antibiotiques, voire plusieurs familles d’antibiotiques. Les bactéries devenues multi résistantes sont très préoccupantes car elles limitent fortement le recours aux traitements disponibles.

L’usage excessif et le mésusage des antibiotiques ont donc conduit à une généralisation de l’antibiorésistance. En parallèle, l’éventail des antibiotiques disponibles est limité et la mise au point de nouvelles molécules reste insuffisante. Ce phénomène a des répercussions importantes en raison de son impact sur l’efficacité des traitements. En France, près de 12 500 décès par an sont liés à une infection à bactérie résistante. Aujourd’hui l’Organisation mondiale de la santé (OMS) considère l’antibiorésistance comme une menace grave à l’échelle mondiale.

 

Un enjeu de santé publique

L’usage des antibiotiques reste cependant élevé, en médecine humaine comme en médecine vétérinaire. Cette consommation à grande échelle a pour corollaire la dissémination de molécules antibiotiques dans les sols et les eaux de surface. L’exposition des bactéries présentes dans l’environnement à ces molécules a pour effet d’accroître le phénomène d’antibiorésistance.

Cet état de fait a conduit les autorités françaises à intensifier les mesures de lutte contre l’antibiorésistance prises dès les années 2000. En 2016, a été mise en place une « feuille de route interministérielle de la maîtrise de l’antibiorésistance » qui s’inscrit dans la démarche One Health (« Une seule santé ») recommandée en 2015 par l’OMS. Il s’agit d’un ensemble d’actions coordonnées prenant en compte comme une seule entité les santés humaine, animale et environnementale.

 

Contribution individuelle

Les décisions prises par les autorités ont eu pour effet de faire diminuer le recours à ces médicaments et leur dissémination, et par là-même de stabiliser le phénomène d’antibiorésistance. Mais un rôle actif est aussi à jouer au niveau individuel.

1- Prévenir les infections

Les précautions visant à éviter ou limiter les infections sont sans doute le premier moyen individuel de limiter le recours aux antibiotiques. Elles sont relativement simples :

  • L’hygiène des mains est essentielle. Le lavage doit être fréquent avec utilisation de savon, plus particulièrement après un passage aux toilettes, au retour au domicile, avant la préparation des repas, après avoir éternué ou s’être mouché, avant et après avoir pris soin d’une personne ou d’un animal.
  • L’hygiène alimentaire est tout aussi importante. Il est nécessaire de conserver les aliments à une température adaptée. Les laver et les cuire suffisamment. Séparer les aliments crus et cuits. Pour les personnes séjournant dans un pays à risque, privilégier l’eau en bouteille et les aliments cuits.
  • La vaccination est sans doute la meilleure des préventions. Les vaccins préservent d’un grand nombre de maladies bactériennes (tuberculose, tétanos, coqueluche, certaines pneumonies ou méningites…). Ils offrent une véritable protection contre les maladies infectieuses.
  • Éviter les comportements à risque (partage de seringue, de rasoir, de brosse à dents) et notamment les rapports sexuels non protégés.

2- Bon usage des antibiotiques

La prescription d’un antibiotique n’est nécessaire qu’en cas d’infection bactérienne, les antibiotiques n’ayant aucun effet sur les virus ou les champignons. Des tests de diagnostic rapide permettent au médecin de confirmer en quelques minutes l’origine bactérienne ou virale d’une infection. Pour éviter un retard de traitement, un antibiotique de première intention pourra être prescrit d’une manière présomptive. En cas d’échec, un test de laboratoire, l’antibiogramme, sera utile pour déterminer l’antibiotique le mieux adapté.

  • Si un antibiotique a été prescrit il est essentiel de respecter la posologie :
    - La dose est adaptée au type d’infection et à la personne. Elle ne doit pas être modifiée même si des effets indésirables surviennent. Si elle est insuffisante le médicament ne détruit que les bactéries les plus fragiles ce qui favorise la multiplication des bactéries les plus résistantes. Trop élevée, le risque d’effets indésirables est majoré.
    - La durée du traitement et le rythme d’administration doivent toujours être respectés. Une exposition trop brève (même si les symptômes disparaissent) ou un intervalle trop long entre deux prises, risquent de laisser intactes un nombre élevé de bactéries. Elles proliféreront à nouveau avec, là encore, une résistance accrue. La probabilité de rechute avec complication est alors très élevée.
  • Proscrire l’automédication : ne jamais utiliser le restant d’anciennes boîtes de médicament, même si les symptômes ressentis sont similaires à ceux d’une ancienne infection. De la même manière, ne pas partager des antibiotiques ou les céder à une autre personne. Seul un médecin peut déterminer la nécessité d’un traitement ainsi que la dose et la durée appropriées. Par ailleurs une prise même faible d’antibiotique hors prescription pourrait fausser les résultats d’un éventuel antibiogramme.
  • Les médicaments non utilisés ne doivent pas être jetés. Cela reviendrait à les disperser dans l’environnement. Ils doivent être rapportés à un pharmacien afin d’être recyclés.
  • Comme avec tout médicament, il faut être attentifs aux effets indésirables. Ils sont anodins la plupart du temps, mais peuvent parfois avoir des conséquences graves.

 

EFFETS INDÉSIRABLES DES ANTIBIOTIQUES

Les effets indésirables des antibiotiques sont très variables selon leurs familles mais aussi à l’intérieur d’une même famille. Deux d’entre eux, cependant, sont communs à tous les antibiotiques : les réactions allergiques et les troubles digestifs.

Les réactions allergiques
Elles peuvent concerner tous les organes, notamment la peau, et prendre des formes variées : démangeaisons, éruption cutanée, urticaire. Certaines, plus rares, sont potentiellement graves comme l’apparition de cloques, un œdème de Quincke ou un choc anaphylactique. Une réaction allergique doit faire changer le traitement et motiver une exploration allergologique pour confirmer l’allergie et rechercher des réactions croisées le cas échéant.

Les troubles digestifs
En détruisant les bactéries pathogènes, les antibiotiques détruisent également les bactéries formant la flore intestinale. Le déséquilibre provoqué entraîne des troubles intestinaux : diarrhées, maux de ventre, ballonnements. Les troubles digestifs sont les effets indésirables les plus fréquemment rencontrés.

Les autres effets indésirables
Le déséquilibre de la flore microbienne de la bouche et du vagin peut favoriser le développement de champignons et l’apparition d’une mycose (candidose ou muguet).
On peut observer divers autres effets indésirables, très variables selon l’antibiotique : réactions de photosensibilisation, néphrotoxicité, troubles hépatobiliaires, troubles neurologiques. Certains sont parfois irréversibles : ototoxicité (troubles de l’oreille) avec les aminosides, toxidermies (lésions cutanées) avec les sulfamides, lésion du tendon avec les fluoroquinolones.

En cas de symptôme anormal pendant ou après la prise d’antibiotiques, il faut en avertir son médecin.

 

En savoir plus :

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