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Pharmacovigilance – Mise en place et prolongation d’une expérimentation du cannabis médical en France

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L’expérimentation du cannabis médical a été initiée le 26 mars 2021, avec pour objectif l’évaluation du circuit de sa mise à disposition en France. Deux ans plus tard, « l’aventure » continue avec un report de la date de fin d’expérimentation à 2024. Mais de quoi parle-t-on exactement ?

Depuis plusieurs années, les données scientifiques internationales s’accordent à souligner l’intérêt thérapeutique du cannabis dans certaines pathologies. Déjà autorisé dans une trentaine de pays, le nombre de demandes concernant son utilisation a nettement progressé en France, tant de la part des patients que des professionnels de santé. C’est pourquoi, un comité scientifique pluridisciplinaire a été créé en septembre 2018 pour évaluer l’état des connaissances scientifiques disponibles et les conditions d’utilisation du cannabis médical à l’international. Le comité a estimé pertinent d’autoriser son usage médical dans certaines situations cliniques et a émis un avis favorable à la mise en place d’une expérimentation en France. Un second comité, créé en 2019, a eu pour mission de définir le cadre de cette expérimentation afin de sécuriser sa mise en place (médicaments utilisés, contenu de formation, registre de suivi des patients). Le 25 octobre 2019, l’Assemblée nationale a donné son accord pour lancer l’expérimentation de l’usage de cannabis médical dans certaines indications thérapeutiques, pour une durée de 2 ans et mise en œuvre par l’ANSM.

L’objectif principal de cette expérimentation est d’évaluer l’ensemble des étapes de mise à disposition du cannabis médical pour les patients : prescription par les médecins, délivrance par les pharmaciens, approvisionnements et suivi des patients.


Mais qu’est-ce qu’une expérimentation ?

  • Vise à tester, dans des conditions réelles d’utilisation, la mise en place d’une nouvelle politique de santé publique (par exemple la vaccination contre la grippe par les pharmaciens de 2017 à 2019).


Pour quelles indications ?

➪ Le cannabis médical
ne sera jamais prescrit

en première ligne de traitement

Figure 1 Les cinq indications du cannabis médical 1, 2


Le cannabis médical : de quoi parle-t-on ?

Le cannabis, de son nom latin Cannabis sativa L., utilisé « depuis la nuit des temps » est une substance illicite3 en France (1). Cette substance est lipophile4, volatile5 et constituée de plus de 500 composants. Les 2 composants les plus connus sont 1) le cannabidiol et 2) le Δ-9-tétrahydrocannabinol.

  1. Le cannabidiol ou CBD est une molécule psychoactive6 antagoniste7 des récepteurs cannabinoïdes CB1 et CB2 (récepteurs ubiquitaires8 du corps humain). Il possède également d’autres activités secondaires sur d’autres récepteurs cellulaires.
  2. Le tétrahydrocannabinol ou THC est une molécule psychoactive agoniste partiel9 des récepteurs CB1 et CB2. Il possède également d’autres mécanismes d’action secondaires en se liant à d’autres récepteurs cellulaires.

La liaison de ces deux molécules à ces récepteurs permet notamment d’expliquer leurs différentes propriétés thérapeutiques d’intérêt.

Au cours de l’expérimentation, deux formes galéniques10 seront utilisées : huile orale en gouttes et sommités fleuries à vaporiser par voie buccale (système d’inhalation ne nécessitant pas l’usage de tabac et/ou de combustion).


Quelle est sa tolérance ?

Dans le cadre de cette expérimentation, les médecins et pharmaciens, formés au préalable, doivent être vigilants quant à la tolérance des patients pour le cannabis médical en prenant en considération les contre-indications, les mises en garde et précautions d’emploi.

Le cannabis est largement métabolisé au niveau hépatique11, exposant les patients traités par cannabis médical et d’autres traitements concomitants à la survenue d’éventuelles interactions médicamenteuses.

Enfin, il expose également à un risque de survenue potentielle d’effets indésirables (céphalées, somnolence, fatigue, diminution des réflexes, nausées, vomissements, diarrhées, irritabilité, anxiété, tachycardie…), ainsi qu’un risque d’abus et de dépendance.

➪ Le patient ne doit pas interrompre son traitement seul, sans l'avis du prescripteur

 

  • Le suivi et l’analyse des effets indésirables et des interactions médicamenteuses sont assurés par les Centres Régionaux de Pharmacovigilance.
  • Le suivi et l’analyse de la pharmacodépendance et de l’abus/mésusage sont assurés par les Centres d’Information et d’Evaluation de la Pharmacodépendance-Addictovigilance.

 

Et ensuite ?

Devant des données jugées encore insuffisantes, à 1 an et demi d’expérimentation, il a été voté à l’Assemblée nationale la prolongation de l’expérimentation d’1 an, entrée en vigueur lundi 27 mars 2023. L’expérimentation devrait donc s’achever en mars 2024 (2).

 

Quiz : Avez-vous retenu ?

Dans le cadre de cette expérimentation, pour quelles indications un patient peut être inclus ?

(Plusieurs choix possibles)

A. Des spasticités douloureuses en lien avec la sclérose en plaques
B. Des troubles du sommeil
C. Des douleurs neuropathiques réfractaires à d’autres traitements
D. Toutes les indications médicales citées avant

Réponse en bas de page

 

Sources :

 

 

1. SEP = Sclérose en plaque = maladie auto-immune affectant le système nerveux central (SNC) entrainant des lésions à l’origine de perturbations motrices, sensitives, cognitives, visuelles ou encore des sphinctériennes.

2. Spasticité = raideur musculaire involontaire, le plus souvent retrouvée au niveau de certains muscles présentant un déficit moteur.

3. Illicite = se dit d’une chose qui est condamnée par la loi et/ou par morale.

4. Lipophile = composé soluble dans les graisses = qui retient les graisses.

5. Volatile = qui passe facilement à l’état de vapeur, qui s’évapore facilement.

6. Psychoactive = substance qui lorsqu’elle est consommée va agir sur le cerveau et qui peut modifier la perception, les humeurs, les sensations, l’état de conscience et/ou la motricité d’un individu.

7. Antagoniste = bloque l’activation d’un récepteur cellulaire, l’empêchant de produire tout ou partie de ses effets habituels.

8. Ubiquitaire = qui peut être retrouvé dans tout le corps humain.

9. Agoniste partiel = substance se fixant sur les mêmes récepteurs cellulaires d’une molécule naturelle de l’organisme et qui produit modérément les mêmes effets.

10. Forme galénique = aspect physique sous laquelle se présente le médicament.

11. Hépatique = concernant le foie.

 

Réponses du quiz : A, C

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