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Plongée sous-marine cet été ? Évitez l’automédication.

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La plongée sous-marine en scaphandre autonome est une activité de loisir couramment pratiquée en France et tout particulièrement en période estivale. Lors de la plongée, l’organisme du plongeur est soumis à un environnement hyperbare, c’est-à-dire à un environnement dans lequel la pression ambiante est supérieure à la pression atmosphérique. Cela modifie le fonctionnement physiologique de l’organisme, en impactant les systèmes respiratoires, cardiovasculaires, thermiques, visuels et sensoriels.Aussi, la pratique de la plongée est très encadrée et nécessite un certificat médical afin de vérifier l’absence de pathologie ou de traitements contre-indiquant la pratique de la plongée sous-marine.

L’ensemble des essais cliniques réalisés pour évaluer la tolérance des médicaments avant leur mise sur le marché est effectué dans des conditions de pression atmosphérique. Très peu d’études ont été réalisées afin d’évaluer la tolérance de ces médicaments en milieu hyperbare. Les quelques données existantes sont majoritairement issues du retour d’expérience des plongeurs. Or, de nombreux plongeurs prennent des médicaments et notamment en automédication, c’est-à-dire sans avis médical. Une étude descriptive sur l’automédication réalisée auprès de 220 plongeurs français* révèle que 60% des répondeurs prennent ponctuellement un médicament en cours de séjours de plongée, dont seulement 33% avec une prescription médicale.  Les principales classes médicamenteuses utilisées par les plongeurs et disponibles sans ordonnance pour traiter un symptôme ou s’assurer un confort physique lors de la plongée sont principalement les :

  • Antinaupathiques, également appelés médicaments
    contre le « mal de mer »
  • Antalgiques
  • Décongestionnants
  • Anti-histaminiques
  • Anti-inflammatoires3

Un essai croisé randomisé, en double-aveugle et contrôlé par placebo réalisé en caisson hyperbare a permis d’évaluer les effets psychométriques** et cardiaques du diménhydrinate (médicament antinaupathique) et de la pseudoéphédrine (médicament décongestionnant) à des pressions de 1 bar (pression atmosphérique) et 3 bars (pression à 20 mètres de profondeur). Trente plongeurs ont participé à cet essai. Il a été mis en évidence que le diménhydrinate réduit le score du test de « flexibilité mentale »***, sachant que la profondeur diminue déjà le score du test de « mémoire verbale ».  Ainsi, l’utilisation de diménhydrinate pour la plongée peut faire courir un risque supplémentaire pour la santé du plongeur.  L’utilisation de la pseudoéphédrine en milieu hyperbare, quant à elle, peut entrainer une augmentation du score de l’anxiété et une augmentation significative de la fréquence cardiaque3,4.

De manière générale, avant une plongée, il convient de :

  • Éviter de prendre un nouveau médicament le jour de la plongée. Il est préférable de débuter tout nouveau médicament plusieurs jours avant la plongée. Ceci afin de vérifier la bonne tolérance au produit et l’absence d’hypersensibilité3.
  • Éviter de prendre des médicaments entrainant des troubles de la vigilance.

Indépendamment de tout traitement, des complications ORL (accidents barotraumatiques de l’oreille ou des sinus, acouphènes, perte auditive,…) ou plus rarement, des accidents graves nommés accidents de décompressions (ADD)2 peuvent survenir au cours d’une plongée. De même, peuvent survenir des vertiges, des paresthésies (fourmillements, engourdissements,…), des troubles de la vigilance et de la vision, une toux… Aussi, il faut suspecter d’abord un incident de plongée avant d’incriminer des effets indésirables médicamenteux.  Ces symptômes peuvent être le signe d’un accident barotraumatique de l’oreille ou d’un ADD par exemple.1 De même, l’apparition d’une sensation de bien-être, de jovialité, d’euphorie ou un état d’angoisse, de perte de vigilance, de somnolence, de désorientation spatio-temporelle, de rétrécissement du champ visuel et de troubles du comportement doit faire évoquer avant tout une « narcose à l’azote » ou « ivresse des profondeurs ». Si ces symptômes de narcose apparaissent, il convient de  remonter vers la surface au moins en partie. Ceci permettra l’amélioration des symptômes qui sont réversibles.1 Cependant, afin de prévenir une potentialisation des effets de la narcose à l’azote, il est donc recommandé d’écarter la prise de médicaments pouvant entrainer ce type d’effets indésirables avant une plongée, (par ex : les antidépresseurs, les benzodiazépines anxiolytiques, les hypnotiques, les anti-histaminiques, et médicaments contenant de la codéine,…).

Idéalement, il est préférable de ne pas prendre de médicaments avant de plonger. En effet, même un médicament jugé sans effet indésirable « significatif » peut entraîner des symptômes compte tenu du fait que chaque organisme réagit différemment à l’exposition au médicament.

Si toutefois, la prise médicamenteuse ne peut être évitée pendant la pratique de la plongée sous-marine, elle doit être encadrée par une prescription médicale. L’automédication est à éviter et le traitement à débuter quelques jours avant afin d’apprécier sa tolérance.  

N’hésitez pas à préciser à votre médecin traitant ou à votre pharmacien que vous faites de la plongée sous-marine afin que celui-ci adapte sa prescription/dispensation de médicaments.

*Sur les 220 plongeurs interrogés par auto-questionnaire anonyme, 106 ont répondu.
**La psychométrie est un domaine où on étudie les caractéristiques mentales (langage, intelligence, mémoire,…).
***Terme employé dans l’étude sans description détaillée des symptômes cliniques.

Références

  1. Gaëlle Pitet. Conseil pharmaceutique officinal en lien avec la pratique de la plongée sous-marine. Sciences pharmaceutiques. 2017. <dumas-01556881>
  2. Bessereau J, Coulange M, Genotelle N, Barthélémy A, Michelet P, Bruguerolle B, Annane D et Auffray J-P. Place de l’aspirine dans le traitement médicamenteux de l’accident de désaturation. Thérapie 2008 Novembre-Décembre ; 63(6):419-423
  3. Kintz P. Accident de plongée sous influence de médicaments : à propos d’un cas et revue de la littérature. Ann Toxicol Anal. 2011 ; 23(4) : 169-174
  4. Taylor S, Taylor D, O’Toole K et Ryan C. Medications taken daily and prior to diving by experienced scuba divers. South Pacific Underwater Medicine Society (SPUMS) Journal. Volume 32 No. 3 September 2002

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